Quelles vont être les répercussions pour les producteurs mondiaux de vanille, importateurs et transformateurs en Europe et au niveau mondial ?
Rappel : baisse du taux de nicotine admissible dans les gousses et extraits de vanille : de 0,3% à 0,02% ppm par kilo applicable en septembre 2023 en Europe.
La modification des Limites Maximales de Résidus (LMR) initiée par l’Union Européenne va entrer en vigueur en septembre 2023. La modification des seuils réglementaires de concentration de résidus de pesticides au-delà desquels la commercialisation des produits alimentaires ne sera plus autorisée concerne particulièrement la filière de la production de gousses de vanille de différents pays.
L’application de cette nouvelle règlementation européenne peut potentiellement bloquer 50% des stocks disponibles dans les pays producteurs de vanille car plus de 50% des stocks disponibles auraient un taux supérieur à 0,05% ppm par kilo selon les dernières analyses réalisées au cours des deux derniers mois qui ont révélé des taux atteignant même 0,5% ppm !
Ces stocks pourront toutefois être commercialisé aux USA ou en Asie où la législation actuelle est plus permissive concernant la présence de résidus dans les produits agricoles.
Comment expliquer la présence de résidus de nicotine dans les gousses de vanille ?
Au niveau botanique, il n’y a pas de présence naturelle de nicotine dans les vanilliers et dans les gousses.
Les recherches sommaires effectuées dernièrement n’ont pas mis en exergue la manipulation des gousses par des personnels « fumeur » lors de la phase de massage des gousses lors de la préparation ou lors du tri des gousses de vanille (mains ou vêtements imprégnés de nicotine).
« L’arbre qui cache la forêt »
Il semblerait que la cause de la présence de résidus de nicotine provienne de mauvaises pratiques de culture lors de la lutte contre les insectes et moisissures dans les plantations.
Des échantillons représentatifs de grandes plantations de différents pays récemment analysés ne contiennent aucune trace de résidus de nicotine détectables alors que d’autres échantillons révèlent la présence de résidus de nicotine en proportion importante dépassant même la législation actuelle.
Explication plausible : des produits fongicides et pesticides seraient détournés de leurs destinations premières et seraient indirectement utilisés dans les plantations de vanille.
Des résidus de plants de tabac seraient récupérés et broyés pour obtenir un liquide qui serait ensuite pulvérisé sur les plants de vanillier. Il faut savoir que les pesticides et fongicides sont autorisés pour le tabac dans des proportions beaucoup plus importantes que pour les produits agricoles destinés à l’alimentation humaine (le tabac est la sixième industrie agricole la plus consommatrice en pesticides par surface cultivée, avec 185 000 tonnes de pesticides déversées tous les ans !). La nicotine est également un insecticide très puissant, 50% plus toxique que le DDT selon Wikipédia d’où son intérêt pour les planteurs peu scrupuleux !
Ce serait l’une des causes possibles expliquant la présence de nicotine dans les gousses de vanille et ensuite dans les extraits de vanille. Le coût de ce traitement des plants de vanillier est très faible et malheureusement très efficace mais à quel prix pour la santé du consommateur final !
On peut légitimement se poser la question suivante maintenant : que va-t-on trouver de plus comme résidus de pesticides ou de fongicides lorsque l’Union Européenne va rendre ces recherches obligatoires à l’avenir ?
Importantes répercussions économiques à venir : on peut considérer que les exportations de vanille de Madagascar vers l’Union Européenne pourraient chuter de moitié entrainant à la fois une chute des revenus de la filière de la vanille malgache (1er producteur mondial de vanille), un appauvrissement généralisé des 100 000 personnes qui cultivent la vanille et vivant déjà proche ou en dessous du seuil de pauvreté et un renchérissement du prix de la vanille en Europe suite à une pénurie de gousses de vanille que les autres pays producteurs ne pourront combler étant eux-mêmes concernés par le problème.
Les produits dérivés de la vanille dont les extraits venant d’autres pays en dehors de l’Europe peuvent s’attendre à des contrôles très renforcés et nécessaires pour ne pas créer une concurrence déloyale avec les entreprises aromaticiennes européennes comme ce fut déjà le cas en 2022 (voir mon article du 2 août 2022 : https://www.linkedin.com/pulse/du-nouveau-%25C3%25A0-propos-de-la-vanille-fausto-bouchereau/?trackingId=XVKFUxtnR7mj0ACsVw7PXw%3D%3D sur le sujet : Depuis le 29 juillet 2022, plusieurs lots de glaces Häagen-Dazs ont été rappelé pour une présence possible d’un contaminant chimique en quantité supérieure au minimum admissible, le 2 Chloro Ethanol dans le constituant vanille (extrait / arôme) utilisé pour aromatiser les glaces. La marque avait déjà l’objet de présence de traces d’un pesticide interdit en Europe, l’Oxyde d’éthylène (ETO) début juillet…
Les prix de vente de la vanille seront alors poussés à la hausse à mon avis et un doublement, voir triplement des prix actuels pourra être d’actualité avant la fin de l’année !